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Mediator: le fonds d'indemnisation soulève de nombreuses questions
PARIS - La création d'un fonds d'indemnisation pour les victimes du Mediator soulève beaucoup de questions sur son fonctionnement mais aussi sur la capacité de l'Etat à se faire rembourser par les laboratoires Servier, a estimé mardi un des avocats des victimes.
De nombreux points doivent encore être éclaircis, a déclaré à l'AFP Me Charles Joseph-Oudin, au lendemain de l'annonce par le ministre de la Santé Xavier Bertrand de la signature du décret d'application créant ce fonds.
Ce projet prévoit qu'après expertise, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) fasse une proposition d'indemnisation. Dans le cas où Servier refuserait d'indemniser, l'Oniam s'en chargerait avant d'engager des poursuites contre le fabricant du médicament pour se faire rembourser.
Nous manquons d'information sur ce que l'Oniam demandera aux victimes, s'il s'agira du dossier médical, du dossier cardiologique, a déclaré Me Joseph-Oudin, qui défend une centaine de dossiers de victimes présumées du Mediator.
Une des grandes questions en suspens, ajoute-t-il, est de savoir qui seront les experts car ce choix conditionne la réponse qui sera donnée à une demande d'indemnisation.
Il est difficile de trouver des experts compétents, tant au niveau de leurs connaissances que de leur volonté d'affronter Servier, affirme-t-il.
Le Mediator, un médicament destiné aux diabétiques en surpoids largement détourné comme coupe-faim, a été retiré du marché en novembre 2009 en raison des risques cardiaques encourus par les patients. Il serait responsable de 500 à 2.000 décès. Cinq millions de personnes l'ont utilisé.
Accepter l'indemnisation du fonds, c'est se priver de la possibilité de poursuites au civil, a noté Me Joseph-Oudin. Il faudra donc en vérifier les modalités, notamment les mécanismes d'indemnisation si le préjudice est modifié, si l'état de santé de la victime s'aggrave.
Nous accepterons l'indemnisation du fonds que si elle nous semble valable, a-t-il prévenu, précisant qu'une partie des victimes s'opposent par principe au fonds car ils sont davantage dans une recherche de reconnaissance de culpabilité de Servier que dans une recherche d'argent.
L'avocat s'inquiète par ailleurs de la coopération du laboratoire, faisant valoir que le problème de la valeur de l'expertise pourrait se reposer en cas de poursuites judiciaires engagées par l'Oniam contre Servier.
J'espère que l'Oniam pourra effectivement obtenir ses créances car ce n'est pas au contribuable de financer l'indemnisation, a-t-il dit.
Mais on a des doutes très sérieux sur la volonté de Servier de coopérer. On le verra le 13 septembre en grandeur nature dans une salle d'audience, a-t-il ajouté, en référence au cas d'une de ses clientes, souffrant de valvulopathie aortique, qui demandera aux laboratoires Servier, lors de cette audience en référé, 20.000 euros au titre du préjudice corporel et 100.000 euros pour préjudice moral.